En panne d’inspiration ces temps-ci, ayant l’impression d’écrire toujours les mêmes choses, j’en profite pour lire plus de poésie.
Je recopie donc un extrait du magnifique (et long) poème Afrique d’Édouard Glissant, poète que j’ai redécouvert dernièrement et dont les textes sont d’une puissance peu commune.
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L’ardue nécessité en vain tordre ton corps, famine
Où poussent vents sagaies mers et fureurs, forêts surprises
La maille du vent lèche le brasier, des enfants crient
Une case brûle un guerrier meurt, des herbages fument
Au ciel brûlé famine, et famine dans ta verdeur
Et dans le mot scellé monotone j’entends famine
Oho mots de nos sang que voici marteler le temps
De jours quatorze fois balancés dans le feu terrible
Je vois ce cœur tressé de fer, les jours crépus, le sang
Et au butin ce rien de sel à goût d’herbe brûlée
Ceux qui vinrent au sel comme des chiens à la curée
Tu n’avais ciel nuit allumeuse ni épieu
Même la nuit te quitta, la nuit même, tu brûlas
Forêts soleils et vents au bout de ta sagaie
Ils firent cargaison de la chair nue de tes enfants
Un si long temps la nue en sa ramée te prit
Saleuse de ce corps où les ans burent médusés
Fontaine tu piétais dans le ravage tu criais
Vie dessouchée, tu criais, ciel sans astre
Et nous en mer, impurs cadastres, d’îles noués
Pour ce sel sans tain qu’ils t’allouèrent les Paladins
Les Chevaliers de sang sous leurs écus rongés de vins
Pour ce butin que tu glanas dans le champ d’histoire
Quand ils eurent moisson de leur gloire sans gloire oho
Tant d’incendies de lèpres tant de nuit, et nul pardon
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