son du soleil acide

la vielle allume des feux étranges
dans ma mémoire
il se passe dans ce son quelque chose de l’été aigre
le soleil acide, doux et perçant
il y a dans ce son quelque chose de tristesse et de pierre arrachée
quelque chose de la bruyère
vielle-complainte
comme un appel à l’étoile qui naît, à l’étoile qui meurt
vielle violente et amoureuse
voix pétrie et stellaire
nef des chemins de terre
très près du corps de l’entour des bras
grésillement du champ sous le givre, bruit du clavier comme de vieux os
grésillement de la douleur tue et quotidienne qu’ont au fond ceux qui vivent
et ta basse enveloppement constant recueilli
chuintement grave de la terre rauque
labourée

arrive le granit fou
cathédrale tendue
projetée
dans un vol de grands draps noirs très haut
vient le geste brutal et doux
suspendu — le serment
à la vielle les déchirures sont exercées d’un coup de poignet
main tendre chagrinée
saccade : ancien soliloque de l’égarement

la vielle est un mystère de vin âcre
vielle-prière dansée au bas des montagnes quelque part au centre du village enfoui
talons, bras,
festin
prière tumultueuse et sans dieu, à rien d’autre que la nuit de joie
alors souvent mêlée remuée enchevêtrée d’hommes et de profonde cornemuse
la vielle
allume des feux étranges dans ma mémoire