nous sommes là gens de la nuit, nous sommes éprouvés de soleil grisâtre nous
marcheurs insatiables des confins, des profondeurs, macérés brusqués masqués de solitude
nous sommes de la nuit lointaine et nous nous aimons
nous sommes deux ou des milliers sans nous connaître
la nuit nous enveloppe la nuit est silence mal taillé, amer et apaisant
je t’aime car tu aimes la nuit car tu la fais tienne et c’est la nuit que
tu fermes les yeux avec un sourire lent et délectable
je t’aime car tu aimes la nuit et ses heures lentes
c’est la nuit que nous apprenons à aimer la solitude
c’est la nuit qu’elle nous vient, nous tue, nous reprend dans ses bras et nous invite
et que seuls, très seuls, nous la tissons
solitude
il n’y a plus de voix
plus d’inconnus avec qui forcer un rire
seul le ronronnement doux et perpétuel des machines aveugles
la nuit est l’heure de ceux que tu choisis
heure de la bière fraîche
heure de la rose
je t’aime toi qui veux un feu et un chat pour toutes paroles
et ce soir tu veux l’arpenter, la nuit
tu veux t’en imprégner et regarder les voitures silencieuses et blanches la transpercer
la nuit épaisse et chaude de Paris
la nuit est l’heure des chats et des amants et la nuit je suis moi aussi ici parfois
avec toi
je tente d’entrer dans ta nuit
avec prudence sans te brusquer sans la déchirer, et je secoue la mienne pour ne pas
qu’elle soit trop humide, je te donne un peu de sa chaleur
la nuit je t’enlace et je sais que tu veux, que tu es bien enfin
la nuit je t’aime et je prends tes mains et tu as froid et tu me souris